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Les symboles constitutionnels : étude sur la force juridique des symboles à partir de l'article 2 de la Constitution de 1958 / Arthur Gaudin
Livre
Edited by Institut Francophone pour la justice et la démocratie - 2022
L’article 2 de la Constitution de 1958 paraît, à la première lecture, entrer en dissonance avec l'idée que nombre de juristes se font d’un énoncé juridique. Il est, en effet, coutumier de présenter le droit constitutionnel comme un ensemble de normes organisant le pouvoir politique et garantissant les droits fondamentaux. Or, l’article 2 contraste par son caractère apparemment peu normatif et son manque de rapport avec les matières constitutionnelles classiques. Cette impression tient essentiellement à la présence de symboles, en l’occurrence le drapeau tricolore, La Marseillaise, la devise « Liberté, Égalité, Fraternité » et le principe du « gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple ». Dès lors, la présente étude se donne pour objet de comprendre pourquoi des énoncés à contenu symbolique sont inscrits dans la Constitution de la Ve République. Il s’avère, au terme du premier temps de la démonstration, que le droit n’est pas rétif au symbolique, l’article 2 parachevant en réalité un mouvement d’écriture juridique des symboles commencé en 1789. Ce mouvement correspond d’autant moins à une anomalie juridique qu’il est porteur d’un sens en droit : il s’agit de consacrer des images et un imaginaire de référence. La juridicité de symboles constitutionnels ne fait plus guère de doute, et s’explique plus précisément par leur importance dans le système de l’État constitutionnel de la Ve République. Non seulement ils incarnent durablement le souverain, État et Nation, mais ils participent à la légitimation du pouvoir étatique. La place des symboles constitutionnels au fondement de l’État induit et justifie la mise en place d’un régime conservatoire. En assurant leur préséance cérémonielle et en réprimant les atteintes à leur intégrité, l’État protège par le droit une part de son identité et de sa légitimité. Néanmoins, le déploiement d’une réglementation de ce type n’est pas sans susciter plusieurs réserves. Il n’est finalement pas certain que le modèle répressif soit le plus adéquat pour préserver la force des symboles constitutionnels. À cet égard, l’institutionnalisation d’une telle protection ne suffit pas à écarter les possibilités d’une désymbolisation, à laquelle seul le réinvestissement du sens paraît pouvoir remédier.
Article 2 of the 1958 Constitution appears, on first reading, to be at odds with the idea that most of the jurists makes a legal statement. It is customary to present constitutional law as a set of norms organising political power and guaranteeing fundamental rights. However, Article 2 contrasts by its apparently non-normative character and its indifference to classical constitutional matters. This reading impression is essentially due to the presence of symbols, in this case the drapeau tricolore, La Marseillaise, the motto « Liberté, Egalité, Fraternité » and the principle of « gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple ». Consequently, the present study aims to understand why statements with a symbolic content are included in the Constitution of the Fifth Republic. It turns out that the law is not opposed to the symbolic, as Article 2 in fact completes a movement of legal writing of symbol that began in 1789. Moreover, this movement makes sense in law : it is a matter of consecrating images and an imaginary reference. The legality of the constitutional symbols is no longer in doubt, and can be explained more precisely by their importance in the system of the constitutional state of the Fifth Republic. Not only do they lastingly embody the sovereign, State and Nation, but they also participate in the legitimisation of State power. The place of constitutional symbols at the foundation of the State induces and justifies the establishment of a protective regime. By ensuring their ceremonial precedence and repressing attacks on their integrity, the State protects part of its identity and its legitimacy by law. Nevertheless, the development of this kind of regulations is not without its reservations. Finally, it is not certain that the repressive model is the most appropriate to preserve the strength of constitutional symbols. Furthermore, the institutionalisation of such protection is not sufficient to rule out the possibility of desymbolisation. Only the reinvestment of meaning seems to be the remedy.
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