Les routes aériennes de Pierre Deffontaines

Dans la préface de cette monographie publiée en 1939 et éditée par la Compagnie Air France récemment créée, Pierre Deffontaines, géographe précurseur, écrit :

« La Géographie, c’était jadis la description de la terre ; c’est aujourd’hui, et de plus en plus, l’étude des rapports entre la terre et l’homme (…) Du jour où l’homme parvenait à s’élever au-dessus du sol et à circuler dans la troposphère, il était donc tout indiqué d’annexer à la Géographie ce nouveau cadre naturel ».

En première partie, l’auteur raconte l’histoire de la conquête du ciel et des perfectionnements de l’aviation. Il explore les voies par lesquelles des pionniers de l’aviation militaire et les progrès techniques donnèrent naissance à l’aviation de transport civil. Les chapitres suivants sont consacrés à l’état des réseaux aériens naissants. Avec beaucoup de cartes, de plans et de tableaux, de croquis et de dessins, Pierre Deffontaines montre la rapidité avec laquelle les grandes nations ont créé, puis se sont partagé les routes aériennes. Puissances montantes (États-Unis, Canada, Australie) et nations coloniales (France, Grande-Bretagne, Pays-Bas) rivalisent pour étendre leurs réseaux.

En 1937 le réseau américain se développe sur 102 445 kilomètres. Le deuxième, celui de la France, mesure alors 60 170 kilomètres. Grâce à la ligne droite, permise par le transport aérien, les tableaux de comparaison des distances et surtout des temps entre le chemin de fer, les voies maritimes et les lignes aériennes révèlent les avantages que présente l’avion. A cette période, les routes aériennes contribuent à « réduire » notre planète et à accélérer la mondialisation économique et culturelle.

Si la Seconde guerre mondiale met un frein à l’expansion de ces routes aériennes, l’agrandissement de ces réseaux reprendra de plus belle dès après la fin du conflit.

Pierre Deffontaines, professeur de géographie à l’Université Catholique de Lille

Pierre Deffontaines (1894-1978) obtient son agrégation d’histoire-géographie en 1922, et devient l’un des géographes français les plus (re)connus de sa génération. Fortement impliqué dans le catholicisme social, il est professeur à l’Université Catholique de Lille de 1924 à 1938, avant de diriger l’Institut Français de Barcelone pendant 26 ans. De son passage à Lille on retiendra notamment la publication en 1931 de La Géographie de la Flandre française à vol d’oiseau.

Il voyage beaucoup ; en Europe de l’est, au Québec, en Amérique latine, où il fonde les chaires de géographie des Universités Rio de Janeiro et de São Paulo. Grand vulgarisateur de la géographie, il collabore à de nombreuses revues et publie beaucoup. Il dirige notamment les deux volumes de géographie générale et régionale de la Bibliothèque de la Pléiade, chez Gallimard.

Il est aussi un géographe de terrain, dessinant les paysages qu’il étudie.

Au contact des populations, il écrit dans son autobiographie cette anecdote : « Je dégonflais mon pneu [de bicyclette] et demandais qu’on me prête une cuvette d’eau pour réparer [...] ; une fois la cuvette arrivée, on causait, la glace était rompue et cela finissait en général par [...] des quantités de renseignements, car les habitants de ce pays sont bavards, intelligents et aiment raconter ... ».

En 1937, Paris-Londres en Ferry & chemin de fer se faisait en 11 heures. Le voyage ne durait que 1 heure et 15 minutes en avion.